Jean-Pierre Sueur a été interviewé sur la moralisation de la vie politique, à l'issue des questions cribles au gouvernement, sur France 3 le jeudi 18 avril.
>> Voir l'interview (à 55 minutes et 45 secondes)
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Jean-Pierre Sueur a été interviewé sur la moralisation de la vie politique, à l'issue des questions cribles au gouvernement, sur France 3 le jeudi 18 avril.
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François Hollande, président de la République, a reçu le mercredi 17 avril la Délégation Parlementaire au Renseignement. Jean-Pierre Sueur a participé à cette audition en sa double qualité de Président de cette Délégation et de Président de la commission des Lois du Sénat.
.Après son adoption définitive par le Parlement, Jean-Pierre Sueur président de la commission des lois du Sénat, se réjouit du fait que la loi relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires comprenne trois innovations majeures qui ont toutes été apportées par le Sénat.
En premier lieu, elle donne plus de liberté que ne le faisait le projet de loi initial pour la désignation des futurs conseillers communautaires qui ne seront plus nécessairement les élus figurant en tête des listes municipales.
En second lieu, il y aura désormais dans toutes les communes de plus de 1.000 habitants deux listes sur le même bulletin de vote. La première sera celle des candidats au conseil municipal. La seconde récapitulera les candidats au conseil communautaire (ceux-ci devront forcément être conseillers municipaux et donc figurer également sur la première liste). Cela aura pour conséquence une grande clarté et une forte lisibilité. Les citoyens voteront pour leurs candidats à la mairie et au sein du conseil de communauté de manière totalement explicite. C’est un progrès non négligeable pour la transparence et la démocratie.
Enfin, conformément au vote exprimé par le Sénat, le seuil à partir duquel la représentation proportionnelle (par listes) s’appliquera a été remonté de cinq-cents à mille habitants. Dans toutes les communes de plus de mille habitants, la parité sera ainsi instaurée au sein des conseils municipaux.
En ces temps de grande tension politique, permettez-moi de vous offrir ce texte souriant sur le débat, au Sénat, sur le mariage pour personnes de même sexe, en présentant à l’avance mes excuses à ceux qui dauberont sur ma coupable légèreté.
Ce débat fut, à maintes reprises, un débat sur le sens des mots. J’y pris toute ma part.
Certains plaidèrent que le sens du mot mariage était défini une fois pour toutes et qu’il était immuable. Ils plaidèrent que la loi ne pouvait avoir ni pour objet ni pour effet de changer le sens d’un mot. De fil en aiguille, ils défendirent des théories fixistes du langage. Chaque mot avait un sens. L’Académie française y veillait et son dictionnaire était la vigie des significations immuables.
Je me suis élevé contre des conceptions que toute l’histoire de la langue française dément, invoquant la magistrale Histoire de la langue française de Ferdinand Brunot et aussi le Dictionnaire de l’Académie française, dont la première édition parut en 1694 et dont la … neuvième édition est en cours d’écriture – chaque édition consignant l’évolution du sens de chaque mot.
Les mots sont comme les êtres humains. Ils sont vivants. Ils changent de sens, parfois radicalement. Ainsi ai-je pris l’exemple du mot latin rem qui signifiait « une chose » et qui, au fil des temps, est devenu le mot rien de la langue française, dont le sens est l’exact contraire.
Mon excellent collègue Jean-Jacques Hyest fit remarquer qu’il ne s’agissait pas de rem mais de res, autrement dit qu’il ne fallait pas s’appuyer sur l’accusatif mais sur le nominatif. Ce à quoi j’objectai que les substantifs français provenaient bien de l’accusatif latin, invoquant le remarquable précis de phonétique historique du français d’Edouard Bourcier paru aux éditions Klincksieck. Ce qui suscita l’intérêt de mon excellent collègue Jean-Pierre Raffarin, qui s’étonna de cette bataille entre l’accusatif (l’objet) et le nominatif (le sujet). Je lui rétorquai que cela était aussi motif à variations : méfiez-vous, cher Premier ministre, du passif, le passif qui transforme au coin d’un bois le sujet en objet et l’objet en sujet…
Donc, les mots changent.
Mes interlocuteurs voulurent bien en convenir. Mais, dirent-ils, il ne revient pas à la loi d’y contribuer. Voire ! Les mots changent au fil des mœurs, des habitudes, des circonstances, des inventions, des sciences, des techniques. Et l’Etat, le Parlement, la loi y contribuent aussi dans ce pays où ils tiennent tant de place depuis l’Edit de Villers Cotterets et maints autres épisodes fameux.
Si la loi est votée, le mot « mariage » changera de sens. Ou plutôt, son sens s’élargira. Le dictionnaire Larousse l’a d’ailleurs anticipé. Il a eu tort. Cela vaut-il pour autant que nos censeurs d’aujourd’hui le vouent aux gémonies ? Voilà un sujet de réflexion…
Et puisqu’il est ici question de langage, j’ajouterai pour finir que ce fut un plaisir d’entendre au fil d’un long débat Christiane Taubira émailler ses interventions de longues et belles citations d’Aimé Césaire, de Paul Eluard, de René Char et de tant d’autres, paroles colorées, luxuriantes, riches de rythmes et de ferveur, comme autant d’hymnes d’amour à la langue française.
Jean-Pierre Sueur
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Jean-Pierre Sueur est intervenu en séance publique, en sa qualité de président de la commission des lois, immédiatement après le vote du Sénat en faveur de la loi ouvrant le mariage aux personnes du même sexe.
>> Lire son intervention
>> Lire toutes les interventions de Jean-Pierre Sueur dans ce débat, du 4 au 12 avril