Le travail des juges est difficile, qui a purgé sa peine et a recouvré la liberté commet un crime, l’émotion est intense. Chacun pense, à très juste titre, à la victime et à ses proches. Chacun pense que ce nouveau drame aurait pu, aurait dû être évité.
Et presque invariablement depuis des années le ministre de l’Intérieur, ou un autre ministre, met en cause les magistrats cependant que le président de la République annonce une nouvelle loi – la cinquième, ou la dixième, on ne sait plus très bien ! – pour éviter la récidive.
Ma conviction est que cette inflation législative n’est pas la vraie réponse. Annoncer une loi nouvelle peut, certes, frapper l’opinion. Mais, à la longue, l’effet s’émousse. Et les problèmes restent là.
Il n’y a pas, pour moi, de solution miracle. Mais on peut et on doit agir avec efficacité pour lutter contre la récidive.
Cela passe davantage par des actes concrets que par des lois nouvelles.
Les rapports sont multiples qui montrent que les conditions de la détention sont les principales causes de la récidive.
A ceux qui en douteraient, le film Le Prophète aura montré la réalité et les effets de la vie en « milieu carcéral » lorsque les moyens ne sont pas à la mesure des besoins et cela en dépit de tout le travail qu’assument les professionnels qui travaillent dans les prisons et œuvrent à la réinsertion des détenus.
Lutter contre la récidive, c’est d’abord lutter contre la surpopulation pénitentiaire qui ne permet pas de préparer dans de bonnes conditions la sortie des détenus. C’est donc réduire les détentions préventives et encourager les peines alternatives à la privation de liberté.
C’est assurer le suivi médical nécessaire des détenus : or, il manque de médecins – et de psychiatres en particulier – en prison.
C’est assurer le suivi de l’application des peines : or les juges d’application des peines sont trop peu nombreux et ne peuvent accorder qu’un temps beaucoup trop faible à chaque dossier - et donc à chaque personne.
C’est préparer une véritable réinsertion professionnelle et sociale des détenus pour qu’à la sortie de prison ils ne soient pas de nouveau à la dérive. Or les moyens des services d’insertion et de probation sont notoirement insuffisants.
Non, même si les jugements des hommes et des femmes ne relèvent jamais de la science exacte, rien n’est inéluctable.
Mais il ne suffit pas de faire de nouvelles lois.
Il faut d’abord appliquer celles qui existent et s’en donner les moyens. Nous en sommes loin !
C’est à toute cela que je penserai en participant ce mercredi 7 octobre à la commission mixte paritaire, rassemblant sept députés et sept sénateurs, qui aura la lourde charge de statuer sur le projet de loi pénitentiaire.
Jean-Pierre Sueur
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