Sondages : une décision inédite 

Je tiens à saluer la décision du quotidien Le Parisien-Aujourd'hui en France de faire une "pause" jusqu'aux élections présidentielles dans la commande de sondages.
En effet, du Brexit à l'élection de Trump en passant par la primaire de la droite, sans oublier les dernières élections régionales, en France, on a beaucoup vu les sondages contredits par les faits. Ce qui, en général, n'a pas empêché les responsables des instituts continuer de disserter sur la situation politique...dès le lendemain des successives bérézinas desdits sondages...
Il est donc bien de prendre le temps de réfléchir au fait que d'instruments de mesure - relatifs d'ailleurs - qu'ils étaient, les sondages sont devenus des acteurs du processus électoral, une part de l'électorat votant contre ce qui est considéré comme étant la prédiction des sondages.
Au delà, il se trouve que mon collègue sénateur Hugues Portelli et moi avons été à l'initiative d'une nouvelle législation sur les sondages et les conditions de leur publication. Cette législation est aujourd'hui en vigueur. Or nous devons constater que trop souvent elle est mal, ou elle 
n'est pas appliquée, sans que cela soit sanctionné, contrairement à ce que la loi prévoit.
Ainsi, il n'y a pas de sens à publier un sondage sans publier la "marge d'erreur" (qui peut être de + ou - 3 ou 2 %). En fait, un sondage ne permet jamais de fixer un chiffre exact mais un écart entre deux chiffres. Or, dans un grand nombre de cas, cette "marge d'erreur", qui est déterminante, n'est pas publiée, ce qui est strictement contraire à la loi.
De même, la loi prévoit que toute l'information utile puisse être diffusée, via le site Internet de la commission des sondages, sur les "redressements" effectués par les instituts et sur les critères de ces redressements. Il est facile de voir que nous en sommes loin ! Et je pourrais citer bien d'autres exemples.
Les sondages ayant pris une telle place dans le débat public, il est assurément nécessaire de réfléchir aux conditions de leur élaboration et de leur publication, ainsi qu'au rôle réel qu'ils jouent dans notre vie politique. Mais la première des choses que l'on peut souhaiter, c'est, tout simplement, que la loi soit appliquée.

Jean-Pierre Sueur
Sénateur du Loiret