J’ai été étonné qu’aucun journaliste, ni du secteur privé, ni même du secteur public n’ait relevé lors de l’émission de ce jeudi soir la grossière contre-vérité exposée par Nicolas Sarkozy au sujet de la nomination du président de France Télévision suite à l’adoption des lois sur l’audiovisuel.
M. Sarkozy a exposé qu’il faudrait que le choix du gouvernement, présidé par le président de la République obtienne l’aval des 3/5e des commissions parlementaires compétentes.
Si tel était le cas, ce serait très bien, car cela supposerait l’accord de la majorité et de l’opposition autour d’une personnalité qui présenterait de réelles garanties d’indépendance.
… Mais ce n’est pas le cas !
Car la loi adoptée stipule bien que c’est l’article 13 de la Constitution qui s’applique. Celui-ci dispose que le président de la République ne peut procéder à cette nomination « lorsque l’addition des votes négatifs dans chaque commission représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés » au sein de ces commissions.
C’est très différent : il ne faut pas que les 3/5e approuvent : il faut que les 3/5e ne s’opposent pas… Et comme on imagine mal que les représentants de la majorité s’opposent à une proposition du Président, il sera évidemment impossible d’atteindre les 3/5e des membres des commissions compétentes.
La réalité est simple : le président nommera ! Et l’avis du CSA (dont les membres sont nommés par le pouvoir en place) et des commissions du Parlement dans les conditions qui viennent d’être rappelées sont tout simplement des leurres, comme l’ont amplement montré les débats à l’Assemblée Nationale et au Sénat.
Mais qu’importe la réalité ! L’essentiel est que les téléspectateurs aient perçu le contraire de cette réalité.

Jean-Pierre Sueur

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