Muséum des Sciences Naturelles -Ssemaine culturelle consacrée au Laos Je suis très heureux de participer ce soir au vernissage de l’exposition consacrée aux cultures du Laos, et organisée dans le cadre de la semaine culturelle laotienne.

Les semaines culturelles sont, en effet, des moments très particuliers dans notre ville, des moments de rencontres, de découvertes, d’ouverture aux autres, de reconnaissance des différences, d’apprentissage de la tolérance. Elles participent à cette définition de l’urbanité que je défends au quotidien, à savoir une forme particulière de relations entre les hommes marquée par la civilité, la correction, la politesse, l’écoute des autres.


Les trois objectifs des semaines culturelles

En effet, l’organisation des semaines culturelles, depuis plus de dix ans par la Ville d’Orléans, a cherché à concilier plusieurs objectifs :

• Le premier objectif est spécifiquement culturel. Il s’agit tout d’abord, grâce à ces semaines, de présenter à ceux qui ne la connaissent pas ou mal, à commencer par la majorité des orléanais, tous les aspects de la culture d’un pays : la richesse de son architecture ; sa ou ses religions ; ses us et coutumes ; les problèmes politiques qui se posent dans ce pays, à commencer par les problèmes des droits de l’homme ; etc.

Je voudrais ici remercier ceux qui ont accepter de prêter leurs pièces de collection amoureux qu’ils sont de la culture du Laos. Je pense en particulier à :

1. Monsieur Somsanith qui recueille depuis plusieurs années des textiles, objets de culte, objets usuels en les préservant ainsi d’une disparition certaine. Il recueille également des savoir-faire qui risquent parfois de disparaître faute de transmission à des plus jeunes.

2. Monsieur et Mme Dammarate qui ont réalisé les costumes de cette exposition ;

3. ainsi que d’autres personnes qui ont bien voulu prêter quelques pièces de leur collection : M. Laurent Moreau, M. Perron, conservateur du Musée de Pithiviers pour le prêt de la collection de son frère missionnaire pendant 30 ans au Laos, Mme Claudine Norrindre, Vénérable Vincent Sudaros, l’association Lane Xang Mahori, M. et Mme Tcha, Mme Leussay, M. Siharate, Mesdemoiselles Cécile Nhoybouakong, Mani-Samouth Doré et Daravanh Somsavady qui ont réalisé l’exposition de l’auditorium, ainsi que toutes celles et tous ceux qui, de façon plus anonyme, ont apporté leur contribution à la réalisation de cette semaine et de cette exposition.

• le deuxième objectif a été de valoriser la culture d’un pays auprès de ressortissants originaires de ce pays. C’est pourquoi, chaque semaine culturelle a été organisée avec les associations orléanaises de ressortissants de ces pays. C’est ce que j’appellerais la perspective intégratrice des semaines culturelles. Pour le Laos, je pense en particulier à quatre associations, dont je voudrais aussi remercier les membres et leur président :

1. l’Association pour la Fraternité Lao à Orléans, présidée par Monsieur Boungnasite ;

2. l’Association des Hmongs du Loiret, présidée par Monsieur Yang Fateu. Monsieur Moua, de cette association, a également activement participé à la réalisation de cette exposition ;

3. l’Association des Thaïdams et son président Monsieur Douan Vilévane ;

4. l’association CAL « Cyrards et coopérants et amis du Laos », animée par Monsieur et Madame Singségsouvane ;


• il y a enfin une troisième perspective, à la fois intégratrice et culturelle. Ces semaines culturelles s’adressent aussi aux enfants dont les parents sont originaires de ces pays mais qui n’y ont jamais vécu. Ces semaines cherchent à leur permettre de mieux s’approprier l’histoire et le culture de leurs parents pour mieux s’intégrer dans notre pays. Longtemps, en effet, nous avons eu, comme perspective, l’assimilation. Cette perspective doit être abandonnée car elle déstructure les individus. Elle nie leur passé, leur histoire, leur culture. Il faut plutôt privilégier l’intégration qui permet à chacun de se sentir citoyen d’un pays sans nier ses différences.

Le Muséum présente également le travail photographique de Christian Gattinoni qui a travaillé avec des jeunes laotiens d’Orléans qui ont photographié leurs proches pendant plusieurs mois. Cette présentation s’inscrit dans cette perspective intégratrice, faite de compréhension de son histoire, de ses origines, pour une meilleure insertion sociale.

Ceci dit, pourquoi avoir choisi cette année le Laos ?

On entend, en effet, fort peu parler de ce pays. Il s’agit du plus petit pays de la péninsule indo-chinoise, enclavé entre la Chine, la Birmanie, la Thaïlande, le Cambodge et le Vietnam, avec 236 000 km² et 4,8 millions en 1998. Il est traversé par le Mékong. Trois ethnies principales y coexistent : les Thaï Lao Loum qui résident dans les plaines, au premier rang desquelles il y a la plaine du Mékong ; les Lao Theung qui résident sur les plateaux et les Lao Soung (qui habitent les montagnes et sont composés principalement par les mhongs).

Sa culture est pourtant particulièrement riche. Le Laos est, par excellence, un pays de l’indo-chine, marqué par les influences politiques et religieuses de ces deux grands voisins, un pays marqué par le syncrétisme religieux, puisque si les bouddhistes sont majoritaires, il existe également des animistes et des chaministes, alors même que ces croyances religieuses s’influencent entre elles.

C’est aussi un pays qui a su conserver ses traditions artistiques et artisanales, même si aujourd’hui des problèmes importants de transmission des techniques ancestrales se posent de façon cruciale. En effet, depuis 1975 et la prise du pouvoir par le parti communiste laotien, le Pathet Lao, la transmission de ces savoir-faire ne s’est pas faite. Et aujourd’hui cette transmission est primordiale.

Il demeure que l’UNESCO a reconnu l’importance de la culture de ce pays en inscrivant, en 1995, toute une ville, Luang Pabang, au patrimoine mondial de l’Unesco. Cette ville témoigne en effet de la richesse de l’architecture typiquement lao, et présente également quelques exemples intéressants d’architecture coloniale.

Cette exposition, comme les conférences ou la soirée du 10 février, permettront de découvrir ces différents aspects de la culture et de l’histoire du Laos, qui est aussi un peu la nôtre avec la colonisation de la péninsule indochinoise.

Cette histoire est aussi un peu la nôtre car, depuis 1996, la Ville de Chinon, soutenue notamment par le Conseil régional du Centre, dans le cadre de la coopération décentralisée, collabore avec la ville de Luang Prabang, afin de préserver son patrimoine architectural. Depuis près de cinq ans, une équipe franco-lao, qui travaille au sein de la Maison du Patrimoine de Luang Prabang, a ainsi réalisé un inventaire exhaustif des constructions anciennes de la ville et a élaboré un Plan de Sauvetage et de Mise en Valeur, destiné à préserver le site. Cette collaboration est particulièrement intéressante et importante, car elle repose sur des échanges réciproques de personnes entre Chinon et Luang Prabang. Il ne s’agit donc pas d’une coopération à sens unique. Elle repose également sur un financement diversifié puisque la Région Centre, l’Agence Française de Développement, l’Union Européenne et l’Unesco soutiennent cette action. Par ses objectifs, comme par son montage financier, cette collaboration est particulièrement importante, et j’espère qu’elle pourra se prolonger durablement.


Cette collaboration est d’autant plus importante qu’il existe, en Région Centre et dans le Loiret en particulier, de très nombreuses personnes originaires du Laos. Il y a aujourd’hui près de 50 familles originaires du Laos qui vivent dans le Loiret. Elles appartiennent à toutes les principales ethnies du Laos.

Mais ces familles ont réussi à s’installer dans notre département grâce, également, à l’engagement de certains. Je voudrais ici rappeler la mémoire de M. et Mme BARRIERE, qui ont beaucoup fait, à la fin des années 1970, pour accueillir dans notre département, les réfugiés laotiens qui quittaient leur pays après la prise du pouvoir du Pathet Lo en 1975. Ils les ont aidés à faire les indispensables démarches administratives. Ils les ont aidés à faire venir en France leurs familles restées en Thaïlande dans des camps de réfugiés. Ils n’ont pas compté leur temps, ni leur argent.

La plupart des laotiens présents à Orléans ont, en effet, quitté leur pays après la prise du pouvoir par le Parti Communiste local, le Pathet Lao, en 1975. Ils sont d’abord passés par les camps de Thaïlande avant de rejoindre l’Europe ou l’Amérique du Nord. Aujourd’hui encore, plusieurs dizaines de milliers de laotiens continuent à vivre dans ces camps, dont plus personne ne parle.

Certains, qui sont arrivés en France à la fin des années 1970, ont été transférés en Guyane, sans qu’il leur ait été alors demandé leur avis.

Cette exposition, et cette semaine culturelle, est donc aussi un acte politique à l’égard de tous ceux qui ont quitté leur pays pour des raisons politiques ou religieuses.

Je voudrais enfin remercier :

Dominique Jammot, directeur du Muséum, et tout le personnel du Muséum qui ont accueilli cette exposition qui s’inscrit d’ailleurs parfaitement dans la vocation du Muséum dont l’une des missions est de présenter des collections à caractère ethnographiques ;

Nathalie Grenon et la Mission des Droits de l’Homme qui organise l’ensemble de cette semaine culturelle et qui a supervisé la conception de cette exposition ;

Je voudrais enfin remercier les partenaires financiers de cette semaine :
• le FAS ;
• le Conseil Régional ;
• la Direction Régionale et Départementale Jeunesse et Sports

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