M. Jean-Pierre Sueur. Nous nous réjouissons d’abord que, grâce à vous, madame la garde des sceaux, qui avez présenté ce projet de loi, et à vous, monsieur le rapporteur, qui y avez beaucoup travaillé, nous parvenions au terme de son examen, ce soir, au... M. Jean-Pierre Sueur. Nous nous réjouissons d’abord que, grâce à vous, madame la garde des sceaux, qui avez présenté ce projet de loi, et à vous, monsieur le rapporteur, qui y avez beaucoup travaillé, nous parvenions au terme de son examen, ce soir, au Sénat.

Toutefois, le groupe socialiste ne pourra voter le texte issu de nos travaux, et cela pour des raisons que je veux exposer
Première raison, nous avons d’abord le profond regret de constater que la majorité du Sénat n’a pas respecté la cohérence profonde des trois volets de la réforme des procédures commerciales, en opposant la question préalable à la fois sur le projet de loi portant réforme des tribunaux de commerce et sur le projet de loi organique modifiant l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature et instituant le recrutement de conseillers de cour d’appel exerçant à titre temporaire.

Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux. C’est en effet dommage.

M. Jean-Pierre Sueur. Il faudra inévitablement reprendre la discussion sur l’ensemble de ces trois textes.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Peut-être, mais sur des bases saines !

M. Jean-Pierre Sueur. La deuxième raison expliquant notre vote apparaît dans le débat qui vient d’avoir lieu sur les articles 2 et 16 : notre assemblée refuse d’ouvrir véritablement à la concurrence les professions d’administrateurs judiciaires et de mandataires de justice.

Le projet de loi initial n’avait pas pour objet de banaliser le recours à des personnes extérieures, il tendait simplement, et légitimement, à mettre un terme à des situations de monopole de fait.

La possibilité pour les juridictions de désigner des personnes non inscrites sur les listes des professions concernées aurait permis d’ouvrir ce secteur à la concurrence, et, dans le projet initial, cette ouverture reposait sur des contreparties offrant toutes garanties.

L’ouverture à la concurrence externe représente pour nous le gage d’une meilleure efficacité du rendu de la justice commerciale. Elle répond aussi à une nécessité dans l’intérêt de ces professions elles-mêmes, comme la commission d’enquête parlementaire l’a d’ailleurs souligné.

Comme vous le savez, le recours à des administrateurs hors liste n’est pas une procédure nouvelle. Il existe déjà dans le droit en vigueur, puisque le tribunal est autorisé à désigner une personne extérieure, mais les conditions qui entourent actuellement ce dispositif – en particulier son caractère exceptionnel – n’incitent pas les juges à y recourir fréquemment.

C’est pourquoi notre groupe approuvait pleinement, sur l’article 2, le sous-amendement n° 151 du Gouvernement à l’amendement n° 5 de la commission et, sur l’article 16, le sous amendement n° 154 du Gouvernement à l’amendement n° 40 de la commission, puisqu’ils visaient à retenir des critères relatifs à la nature de l’affaire, sans référence au caractère exceptionnel de la procédure.

Dès lors, la crainte de voir la profession se vider de ses éléments les plus dynamiques aurait dû être apaisée.

Nous regrettons donc qu’il n’y ait une véritable ouverture des professions visées. En quelque sorte, nous avons fait du sur-place. Nous espérons que les débats ultérieurs nous permettrons d’avancer, car, tout en préservant ce qui donne à ces professions leurs compétences propres, il faut les ouvrir sur l’extérieur – en maintenant, bien sûr, les garanties nécessaires de nature à éviter la banalisation du recours à des personnes hors liste – pour permettre leur rénovation. C’est le moyen de les adapter à l’évolution économique que nous connaissons, dans l’intérêt de nos entreprises et des justiciables.

Nous souhaitons, madame la garde des sceaux, monsieur le rapporteur, que l’on parvienne, dans les temps futurs, à un accord sur la base du travail qui vient d’être accompli par l’Assemblée nationale et par le Sénat !

Thème : DIVERS