Nul n’aurait imaginé il y a six mois que plus de la moitié de l’humanité se trouverait confinée.
Honneur soit rendu aux rares visionnaires qui avaient vu venir le péril !
Mais pour l’heure, chacun voit que l’urgence est de tenir bon et de tout faire, tous ensemble, pour vaincre ce mal, guérir les malades et sauver des vies.
Honneur, oui grand honneur, à tous ceux qui y travaillent, nuit et jour, les professionnels de santé, bien sûr, et tous les autres… Et je ne citerai pas toutes les professions qui travaillent aujourd’hui, dans le courage et l’abnégation, de peur d’en oublier.
Mais m’étant trouvé très récemment dans un EHPAD, je témoigne de toute l’humanité que j’ai trouvée chez les médecins, infirmières et aides-soignantes au cœur d’une situation très critique.
Dans ce contexte, on attend des parlementaires qu’ils assument leur fonction : légiférer et contrôler la mise en œuvre des lois.
J’ai parlé la semaine dernière de la législation. Nous avons adopté en quatre jours une loi d’urgence sanitaire qui était absolument indispensable.
Celle-ci autorise la publication de nombreuses ordonnances. Notre rôle est maintenant d’exercer un contrôle indispensable car nous avons dû – pour la bonne cause – déroger massivement au droit commun. Et cela appelle une grande vigilance.
Chacun mesure les leçons qu’il faudra tirer de cette situation très difficile.
Et comment ne pas dire d’abord combien paraît révoltante la foire d’empoigne qui sévit sur les masques produits en Chine.
C’est purement et simplement la loi de la jungle !
Chacun voit qu’il faudra relocaliser en France et en Europe de nombreuses productions essentielles.
Mais mesurons dès aujourd’hui les conséquences de choix aussi souhaitables. Ils auront forcément un coût.
De même, l’affectation de plus de moyens aux hôpitaux et une plus juste rémunération de leurs personnels sont aujourd’hui unanimement soutenues. Ce ne sera que justice.
Enfin, la prise en compte de la compensation du « manque à gagner » de tant d’entreprises, grandes et petites, et de tant de professionnels est unanimement considérée comme juste et justifiée…
… Mais il faudra en tirer les conséquences en termes de priorités. Tout ne pourra pas être prioritaire.
Il faudra gagner la bataille du déconfinement, mais au-delà une autre bataille s’annonce, celle d’une société résolument centrée sur les vraies priorités, sur ce qui est essentiel au détriment de ce qui l’est moins ou ne l’est pas.
Non, nous ne pourrons revenir au statu quo !
Cela pourra être un terrain fertile pour les démagogues.
Préparons-nous, tout au contraire, à saisir l’occasion de cette « nouvelle donne » pour bâtir une société plus juste et plus humaine.
Jean-Pierre Sueur