Je signale la parution de mon nouveau livre, chez Odile Jacob : "Une journée singulière. Autopsie politique".
Une vision distanciée, littéraire et imprévue de la vie politique et administrative.
Ed. Odile Jacob, 196 p., 19,90€
L’ATAO : UN BEAU COMBAT POUR LA CULTURE !
Qu'il me soit permis d'abord, de remercier très chaleureusement Jean-Marie Caplanne et Alain Labrouche qui ont tenu la barre du navire ATAO ces dernières années, avec énergie, courage dévouement - et l’amour du théâtre !
Ces remerciements s'adressent, bien sûr également à toutes celles et ceux qui ont œuvré avec eux et à toutes celles et ceux qui, 53 ans durant, on fait vivre l’ATAO et ont partagé le même amour du théâtre - depuis que Marcel REGGUI a donné l'impulsion d'un renouveau à la culture à Orléans avec l’A PAC - Association Populaire d'Action Culturelle – l’ATAO comme les Semaines Musicales d'Orléans étant ensuite créées dans le même mouvement, je dirai le même souffle…
Ce furent donc 53 ans d'effort, de travail et surtout de passion, qui se sont traduits par 353 pièces de théâtre présentées, avec le souci constant - y compris pour ce qui est du prix des billets - que ces pièces soient accessibles à tous !
Les principes découlaient du même titre que l'association s'était donnée : le Théâtre d'Aujourd'hui.
Et il était bon de les redécouvrir d'un « œil neuf ». Il était bon également de présenter le travail des écrivains et metteurs en scène contemporains. Les deux préoccupations ne s'excluaient pas. Elles se complétaient. Et puis il y a toujours eu cet autre principe déjà évoqué : l'ouverture à tous, la culture offerte à tous les publics et non cantonnée à ceux pour qui elle était « naturelle », elle allait de soi, dans la droite ligne du renouveau que fut la décentralisation théâtrale avec, notamment, la création des Centres Dramatiques Nationaux.
Mais il y avait aussi une éthique, qui a présidé aux choix qui ont été faits. Il fallait que les mises en scène pour actuelles et renouvelées qu'elles soient, fussent respectueuses du texte et de l'auteur. Trop de metteurs en scène, aujourd'hui, se prennent pour les auteurs. Le texte n'est plus pour eux qu'un prétexte à des prestations ou gesticulations souvent gratuites. Il y a là une dérive dans laquelle l’ATAO n'est jamais tombée… Et c'est encore une autre raison pour lui rendre hommage !
L’ATAO n'existe plus sous la forme que nous avons connue. Mais puissent son esprit, sa force, son originalité, son âme vivre et survivre autrement !
Lorsqu'elles sont aussi belles et fécondes, les lumières de la rampe ne s'éteignent pas !
À l'initiative de son fils, Stéphane Sainson, un livre vient de paraître, consacré à l'oeuvre d' Huguette Sainson.
Il m'a fait l'honneur de me demander d'en rédiger la préface.
Ce livre, intitulé Huguette Sainson. Orléans au temps de la publicité et des Relations Publiques, est publié aux éditions Autre Chose Autrement, 367 p., 32 €.
À l’heure où « les immigrés » sont l’objet des pires démagogies politiciennes, je tiens à signaler tout particulièrement le livre que vient de publier Régis Guyotat aux éditions
« Regain de lecture » sous le titre : « L’homme au passe-montagne » avec comme sous-titre « Être immigré à Orléans durant les Trente Glorieuses ».
À l’époque couverte par ce récit (de 1958 à 1978), Régis Guyotat était correspondant du « Monde » pour la région Centre. Il s’impliquait aussi dans l’élaboration et la rédaction de la « Tribune d’Orléans », une revue qui a souvent donné la parole aux immigrés et aux syndicats ainsi qu’aux associations qui les soutenaient, comme « Accueil et Promotion », présidée par François Vannier, ou l’Association de soutien aux travailleurs immigrés (ASTI), fondée par Jean-Pierre Perrin-Martin. C’est dire qu’il connaît bien le sujet !
C’est donc à travers une histoire vécue qu’il écrit sur « ces étrangers qui ont construit la France », qu’il s’agisse du grand ensemble urbain de La Source, des travaux publics, des centrales nucléaires, de la fonderie, sans oublier le maraîchage et tes travaux agricoles. Ces étrangers, la France les a fait venir. Elle leur doit une part non négligeable de cette période de croissance. Et en dépit de l’aide précieuse des militants des associations, de certaines communes, de travailleurs sociaux, ils ont été trop souvent contraints de vivre dans des conditions lamentables que décrit précisément Régis Guyotat. Il souligne aussi les efforts accomplis pour créer des foyers, en nombre toujours insuffisant, et, de surcroît - ce qu’on ne dit pas - financés par le « Fonds d’Action Sociale »(FAS), largement alimenté par les sommes dues aux travailleurs immigrés au titre d’allocations sociales qui n’étaient pas perçues lorsque les enfants restaient dans le pays d’origine - c’est à dire qu’ils ont payé, en fait, eux-mêmes la construction de ces foyers !
On a eu besoin d’eux. Et puis le choc pétrolier arrivant, on a voulu les inciter à repartir, avec une aide financière au retour bien faible…et donc inefficace ! Et puis, en réalité, on a toujours et encore besoin d’eux…Aujourd’hui même, alors que l’extrême droite (et d’autres aussi, hélas) font leur miel politicien de leur « départ », le patronat - et d’autres - expliquent que, sans eux, les métiers de la restauration, de l’hôtellerie, des BTP, de la salubrité, des cultures spécialisées… ne peuvent - et ne pourraient - pas fonctionner !
Et on méconnait les efforts accomplis par ces êtres humains qui ne quittent pas leur pays, la misère, ou les oppressions, par plaisir…mais sont contraints de rassembler les économies d’un village…pour financer des passeurs qui sont des escrocs, et même des criminels, qui laissent s’enfoncer dans la Méditerranée, des rafiots suroccupés, transformant cette mer, et la Manche aussi parfois, en cimetière à ciel ouvert….
Et c’est réconfortant de voir aujourd’hui, en Grande Bretagne, en réponse à l’extrême droite, des foules chaleureuses de manifestants portant des pancartes sur lesquelles on lit : « Non à la haine » et « Bienvenue aux réfugiés »….
On me dira que je m’éloigne du livre de Régis Guyotat. Pas du tout. Car il décrit à partir de nombre de faits précis les mécanismes de l’exclusion, du rejet, du racisme. Et aussi les actions de solidarité, les régularisations après 1981…et appelle, au-delà des statistiques - chacun a les siennes - et des discours démagogiques, à des solutions tout simplement humaines.
Dire que les étrangers sont un « danger » ne règle rien, et envenime tout. J’ajoute que quelle que soit la couleur de leur peau, ou la provenance de leurs parents et grands-parents, toutes celles et tous ceux qui gagnent des médailles olympiques sont forcément d’excellents Français devant lesquels on ne se prive d’aucun superlatif !
Les questions sont devant nous. Elles sont importantes pour la France et pour l’Europe. L’accueil des réfugiés est un droit. Les exils pour raison économiques ne s’arrêteront pas par enchantement. Les exils pour raison climatique s’y ajouteront…Cela appelle une lutte impitoyable contre les passeurs, des accords avec les pays d’origine, des règles claires et humaines. De vraies politiques d’intégration…
C’est à tout cela que l’ouvrage de Régis Guyotat nous invite à réfléchir !
Jean-Pierre Sueur