Dès lors que la phase dite de « déconfinement » commence le 11 mai, et que les écoles, les commerces, les transports publics, etc. vont pouvoir accueillir des personnes dans des conditions strictement définies, il serait difficilement compréhensible que l’on ne puisse pas réunir avec, naturellement, toutes les précautions requises, les conseils municipaux élus au complet lors du premier tour des élections municipales du 15 mars dernier pour désigner enfin les maires et les adjoints.
Cela concerne 30 000 communes environ au sein desquelles la situation actuelle est hybride. En effet, les élus « en place » restent en fonction quand bien même ils n’étaient pas candidats ou ont été battus, cependant que les candidats élus n’ont aucun pouvoir. Je sais – pour le constater chaque jour ! – que la plupart des élus « en place » exercent leur responsabilité avec un grand dévouement et un sens élevé de l’intérêt général. Je connais de nombreuses communes où les uns et les autres collaborent harmonieusement (et je sais, bien sûr, que cela ne pose aucun problème là où les listes ou majorités en fonction ont été reconduites). Mais je constate aussi, ici et là, que cette situation hybride crée des tensions dont on se passerait bien en cette période critique. Et de toute façon, il est clair que le simple respect des suffrages exprimés et de la démocratie appelle qu’on mette fin à cette situation hybride.
Je pense que le message des associations d’élus à cet égard aura été compris par nos gouvernants.
Toujours est-il que je déposerai ce lundi 4 mai un amendement au Sénat visant à fixer l’entrée en fonction des nouveaux conseils municipaux (élus complètement) au 18 mai dans les communes de moins de 1 500 habitants et au 2 juin dans les communes de plus de 1 500 habitants, l’élection du maire et des adjoints intervenant dans tous les cas entre cinq et dix jours après les dates d’installation.
Vient ensuite le cas des communes de moins de mille habitants où le conseil municipal n’a pas été élu au complet. Cela concerne 3 455 municipalités. Dans ces communes, tous les conseillers municipaux élus au premier tour voient leur élection acquise, comme l’a confirmé la loi du 23 mars dernier. Il reste donc à compléter les conseils municipaux, ce qui, dans 70 % des cas, se traduira par l’élection de moins de quatre conseillers municipaux. Il me paraît sage d’organiser dans ces communes avant la fin juin, cette élection complémentaire, ainsi que l’envisage le rapport de la mission de suivi de l’état d’urgence sanitaire de la commission des lois du Sénat que je reproduis ci-dessous. Comme il s’agira d’élections pour lesquelles le nombre d’électeurs sera restreint, il est possible de les organiser dans le respect des règles sanitaires requises.
Reste la question des 1 442 communes où le conseil municipal n’a pas été élu au terme du premier tour. Dans ce cas, la position du Conseil d’État est claire : il doit y avoir entre le premier et le second tour un délai raisonnable. C’est pourquoi, il a été prévu par la loi du 23 mars que celui-ci pourrait avoir lieu en juin – et le rapport précité envisage que cela puisse aller jusqu’à début juillet.
Cette solution paraît la meilleure, mais elle n’est pas la plus probable. En effet, le gouvernement doit décider cela avant le 23 mai sur la base d’un rapport scientifique. Or la prolongation pour deux mois de l’état d’urgence sanitaire semble, du moins à ce stade, difficilement compatible avec cette solution. Si donc elle n’est pas retenue, comme cela est écrit dans la même loi du 23 mars qui reprend l’avis du Conseil d’État, il faudra refaire un premier tour puis un second tour après l’été. Je pense que le plus vite sera le mieux – même si le rapport précité expose qu’il sera, eu égard aux règles en vigueur, difficile d’organiser ces deux tours avant octobre.
Voilà l’état de la situation.
J’ajoute pour finir qu’il est une raison supplémentaire pour régler ces questions le plus vite possible, dans la mesure où, bien sûr, les contraintes sanitaires le permettraient : elle tient à la nécessité de faire « redémarrer » rapidement les intercommunalités. Or, les membres des conseils des communautés de communes et d’agglomération ainsi que des métropoles, sont élus… par les conseils municipaux. Certes des conseils « hybrides » associant nouveaux élus… et anciens élus pourront fonctionner durant cette phase transitoire. Mais c’est loin d’être l’idéal. Il faut que ces conseils aient dans les meilleurs délais leur pleine légitimité. Car, ne l’oublions pas, ce sont eux qui décident de nombre d’investissements et que c’est loin d’être négligeable pour la relance de l’activité dans le secteur du bâtiment et des travaux publics, mais aussi dans nombre d’autres domaines.
Jean-Pierre Sueur
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