Le harcèlement téléphonique est devenu un véritable fléau. J’ai tenu à dénoncer avec force, ce jeudi 4 juin, au Sénat, ce fléau et ses conséquences lors du débat sur une proposition de loi qui contient quelques mesures utiles, mais que je juge cosmétiques par rapport à l’ampleur du mal.
J’ai cité le cas de ces personnes âgées vivant dans de petits villages de campagne ou de montagne qui, lassées d’être harcelées cinq ou six fois par jour par des sollicitations commerciales, ont décidé de ne plus répondre à leur téléphone. La conséquence, c’est que le maire ou les pouvoirs publics ne peuvent plus les prévenir en cas de catastrophe, inondation ou incendie, ou que leur infirmière ou leur médecin ne peuvent plus communiquer avec elles.
J’ai proposé une mesure simple, qui est déjà en vigueur dans onze pays d’Europe, et j’ai présenté un long amendement en conséquence. Il s’agit d’inscrire dans la loi que ne peuvent être appelés au téléphone pour des offres ou démarches commerciales que les personnes qui ont donné préalablement leur accord de manière claire, précise, explicite.
Malheureusement, la majorité du Sénat n’a, pas plus que celle de l’Assemblée Nationale, retenu cette solution présentée par plusieurs groupes politiques, dont le groupe socialiste auquel j’appartiens.
Nous avons réussi en revanche – un peu par surprise – à voter la possibilité de mise en place d’un préfixe qui serait commun à toutes les sollicitations commerciales. Ainsi, à la simple vue des chiffres correspondants, les personnes sollicitées pourraient choisir de ne pas répondre. Cette disposition est conforme aux règles européennes et encouragée par les instances européennes.
Je crains toutefois qu’elle ne subsiste pas à la suite de la commission mixte paritaire et du vote des députés. On verra – et je serai vigilant.
Un autre point d’accord est aussi apparu pour interdire les offres en matière d’économie d’énergie sur les logements. L’ensemble des associations de consommateurs nous ont en effet alertés sur la multiplication d’offres fallacieuses se traduisant par des travaux inefficaces, un gâchis d’argent public et un grand nombre de litiges.
Toutefois, la proposition principale que j’avais défendue n’ayant pas été retenue, alors que le Sénat avait voté il y a quelques années une proposition de loi de Jacques Mézard qui faisait cette même proposition, je me suis abstenu, avec mon groupe, sur ce texte.
J’espère vivement que nous arriverons dès que possible à un vote positif sur ce consentement préalable. Car la réalité, c’est que nombre de nos concitoyens sont excédés. La loi de la marchandise, après avoir dévoré une partie de l’espace (les entrées de ville) est en train de dévorer le temps ! Il faut mettre fin à ce qui est devenu une véritable pollution…
Jean-Pierre Sueur
Ces huit minutes et quarante-six secondes d’horreur durant lesquelles un homme, George Floyd, a été tué suscitent l’effroi et la révolte. Que pendant ces huit minutes et quarante-six secondes l’auteur de ce meurtre lent, terrible, n’ait pas connu un moment d’hésitation, de doute, n’ait pas eu l’idée d’interrompre la pression, que les trois acolytes soient restés de marbre, oui, cela suscite l‘effroi et la révolte.
Et pourtant, je ne souscrirai jamais aux amalgames. Cette horreur, cet effroi, cette révolte ne doivent jamais cautionner les discours implicites ou explicites accusant l’ensemble des policiers et gendarmes de racisme. Je connais nombre de policiers et de gendarmes qui accomplissent leur métier, qui n’est pas facile, dans le respect le plus total de nos principes républicains. Je connais leurs familles. Et je sais combien ces amalgames sont pour eux et pour elles insupportables.
Mais je ne veux pas en rester là.
Je tiens à dire également que chaque fois qu’une dérive raciste, qu’un acte raciste est accompli par un policier ou un gendarme, et que cela est attesté, qu’il ne s’agit pas seulement d’une rumeur ou d’un soupçon, il revient à l’autorité compétente, en l’espèce le ministre de l’Intérieur, de réagir avec la plus grande fermeté, de saisir la justice et à celle-ci de décider des sanctions exemplaires – celles qui sont d’ailleurs prévues par la loi. Faute de quoi on encourage et on accrédite les amalgames que je viens de dénoncer.
Cela vaut aussi pour le réseau qui vient d’être découvert sur Facebook et qui contient nombre de messages racistes. Qu’un tel réseau, pour fermé qu’il soit, puisse exister, est intolérable et de surcroît contraire à la loi – la loi que ceux qui sont les instigateurs de ce réseau ou qui l’alimentent ont pour charge de faire appliquer.
Jean-Pierre Sueur
Par une question écrite, Jean-Pierre Sueur a interpellé le ministre de la Culture, Franck Riester, sur les difficultés rencontrées par les écoles d’architecture.
Lorsqu’un artiste vient illustrer des livres, ou plus particulièrement des livres de poésie, cela peut susciter des sentiments mêlés. L’on se dit que si l’œuvre, si les poèmes sont forts, point n’est besoin d’illustrations. Le texte se suffit à lui-même. Nous le lisons, il nous parle. Un rapport singulier s’instaure entre lui et nous. Et, si le livre est réussi, il se fait aimer seul, pour lui-même.
Il arrive, à rebours, que des artistes rejoignent des poètes, qu’ils communient avec eux. Il ne s’agit pas pour l’œuvre graphique d’enrichir l’œuvre écrite. Non, le terme ne convient pas. Les deux œuvres se rejoignent, elles se répondent, elles entretiennent un dialogue, elles créent des harmonies nouvelles.
Tel est le cas avec un beau livre qui vient de paraître aux éditions Prodromus où se rejoignent la très connue – mais sans doute encore trop méconnue – Tapisserie Notre-Dame de Charles Péguy et les peintures de Sébastien Le Roy.
Celles-ci répondent bien, avec force et sobriété, aux côtés ensemble (écrivons comme Charles Péguy !) charnel et mystique de l’admirable Présentation de La Beauce à Notre-Dame de Chartres, qui constitue le cœur de l’ouvrage.
Et je ne puis mieux faire pour finir que de citer ces lignes de la présidente de l’Amitié Charles Péguy, Claire Daudin, qui écrit dans sa préface : « La "pâte" de Sébastien Le Roy, la texture même de sa peinture (….) est ce qu’il fallait pour reconstituer au poème son épaisseur, au-delà des lectures et des illustrations éthérées qu’on a pu en faire. Son usage parcimonieux des couleurs convient également au stylo de Péguy (…), grave et sans fioritures, refusant l’anecdote et le joli (…). Ainsi, les rosaces et les vitraux de la cathédrale viennent-ils illuminer ces tableaux, fulgurants éclats de couleur après la monotonie des à-plats beige et gris de la Beauce. L’art permet de ces rencontres, par-delà les années, par-delà les disciplines. Il est une première victoire sur la mort. »
JPS