Louis-Joseph Soulas est un artiste considérable.
Il était graveur. Il est l’auteur de milliers de gravures, par leur réalisme qui va de pair avec une profondeur qui donne toute leur âme, triste, tragique ou sereine et lumineuse aux êtres, aux paysages et aux choses.
Né à Orléans, il a vécu à Coinces près du Moulin de Lignerolles – que la mairie de cette commune a heureusement entrepris de restaurer – parmi les paysans de la Beauce et les apiculteurs, avant d’aller à Paris, pour se former à l’école Estienne. Il y a conçu très vite ses premières œuvres. Puis il est revenu à Orléans où il a dirigé l’école des Beaux-Arts et a présidé l’Association des artistes orléanais.
Je voudrais rendre hommage à sa fille Thérèse qui s’est beaucoup battue pour que l’œuvre de son père mort prématurément en 1954, à 49 ans, fût enfin connue et reconnue à Orléans, mais aussi en France et à l’étranger – où les plus grands musées exposent ses gravures.
Ainsi, une exposition qui lui est consacrée vient d’ouvrir ses portes à la médiathèque d’Orléans, plusieurs de ses œuvres sont reproduites aux entrées du parc Pasteur, et surtout un livre admirable que l’on doit à Christiane Noireau, et qui est préfacé par Antoine Prost, vient de paraître. Ce livre offre, outre des textes passionnants, de très belles reproductions de gravures qui ont, le plus souvent, illustré des revues ou des livres qu’il est aujourd’hui difficile de retrouver.
Parmi ces magnifiques reproductions, je citerai celle qui illustre Le miroir de Baudelaire (parue dans la revue Le Grenier), celles qui représentent Beethoven, Max Jacob, Berlioz, Wagner et Charles Péguy (parue dans la revue Le Mail qui, comme Le Grenier, publiait des textes de Jean Zay, Roger Secrétain, René Berthelot et Marcel Abraham) ; celles qui ont illustré Raboliot et Rémi des Rauches de Maurice Genevoix ; La présentation de la Beauce à Notre-Dame de Chartres de Charles Péguy ; Dominique d’Eugène Fromentin ; Les lettres de mon moulin d’Alphonse Daudet ; La marche à l’étoile de Vercors ; Le journal d’un curé de campagne de Georges Bernanos…
Ajoutons les propres œuvres de Louis-Joseph Soulas écrites et illustrées par lui : La gerbe noire et Les bêtes de la nuit.
N’oublions pas ses séries de gravures, très réalistes, consacrées à « Ceux de la terre », aux prisonniers et aux ruines d’Orléans (de 1942 à 1947).
(N’oublions pas non plus… ses billets de banque, puisque, de 1929 à 1935, Soulas fut employé par la Banque de France pour graver des billets de banque français et étrangers !)
Je terminerai par deux citations que je dois à Christiane Noireau.
La première est de Roger Secrétain : « Il se répétait assez pour imposer un style ; il se renouvelait suffisamment pour étonner et pour ravir (…). Il a mis le meilleur de son être dans ces paysages dont l’âme a consenti pour lui à se révéler et que nous ne nous lasserons pas d’admirer. »
La seconde est de Maurice Genevoix : « Ce grand travailleur, ce silencieux, si robuste et si probe, n’a jamais dévié de sa route, jamais cédé aux tentations faciles, aux attraits du succès temporel. Il a été soucieux de sa seule vocation : labeur, scrupules, maîtrise ardument poursuivie et gagnée, c’est à cette vocation qu’il a tout rapporté, tout donné, avec une loyauté et un courage, un contentement du cœur où il trouvait la seule récompense qui comptât à ses yeux. »
Jean-Pierre Sueur
(photo Patrice Delatouche)
• Le livre de Christiane Noireau, intitulé Soulas est proposé par les éditions « Mémoire d’une terre gravée », 3 rue Pierre-Henri Spaak, 45000 Orléans.
• Christiane Noireau fera une conférence sur Louis-Joseph Soulas, samedi 17 octobre à 15 heures à la Médiathèque d’Orléans.
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