En cette période de campagnes municipales, et pour tous ceux qui s’intéressent à la démocratie locale.
Il a été écrit par René Dosière qui joint à sa connaissance de l’œuvre de Charles Péguy (qu’il cite lors de chacune de ses interventions à l’Assemblée Nationale !) une grande ténacité dans la recherche de la vérité sur les dépenses publiques.
Cette ténacité s’est d’abord exercée en direction de la présidence de la République dont René Dosière parvint, à force de dizaines de questions écrites, sans cesse relancées lorsque la réponse tardait, à clarifier les financements qui faisaient appel à nombre de transferts de dépenses sur quantité d’autres chapitres. L’une de ses victoires fut d’obtenir enfin que le budget de la présidence de la République fût contrôlé par la Cour des Comptes – ce qui est aujourd’hui le cas.
Poursuivant sa tâche, René Dosière s’est intéressé, en toute objectivité, aux finances des collectivités locales.
Le livre qu’il vient de publier est le fruit de ses analyses ; mais aussi de son expérience et de ses réflexions d’élu local et national.
René Dosière écrit sans démagogie aucune. Il faut lire en particulier les pages qu’il consacre à ce qui est depuis des décennies un échec collectif, à savoir notre incapacité à réformer la fiscalité locale, et expose comment la bonne idée d’asseoir, pour une part, la taxe d’habitation sur les revenus, fut constamment retardée et en fait refusée pour de mauvaises raisons.
Il plaide pour la rigueur dans la gestion locale et s’inquiète du fait que la si nécessaire généralisation de l’intercommunalité (avec les communautés urbaines, d’agglomération et de communes) ne se soit pas traduite par des transferts rigoureux de dépenses de personnel – et autres –, à due concurrence, dès lors que les compétences étaient transférées à l’instance intercommunale. Il y a vu, à juste titre, l’origine des dérapages financiers qui auraient pu – et doivent – être évités.
La montée des instances intercommunales ainsi que des décisions qui leur incombent en matière de dépenses comme de recettes le conduit à poser la question de leur légitimité démocratique et donc de l’élection des membres de leurs conseils au suffrage universel direct.
Un pas en cette direction sera accompli lors des prochaines élections municipales, puisque les candidats au conseil municipal comme au conseil communautaire figureront sur le même bulletin de vote.
Mais il ne s’agira pas d’une élection distincte.
J’ai souvent dit ma position à cet égard. Je pense qu’une élection directe des conseils communautaires s’imposera pour les métropoles et communautés urbaines, voire d’agglomération, mais qu’une telle évolution serait aujourd’hui mal acceptée et mal vécue dans les communautés de communes.
Le livre de René Dosière est un plaidoyer pour la rigueur, la déontologie, l’éthique.
Il a raison de noter combien la décision récente quant aux « surplus » résultant de l’écrêtement des indemnités des élus cumulant plusieurs fonctions est salutaire. Alors que ces sommes étaient reversées dans des conditions discutables à certains autres élus, elles seront désormais – à partir de mars 2014 – purement et simplement reversées aux collectivités locales concernées.
Mais la question devrait ne plus se poser en 2017, avec l’application de la loi sur le non cumul des mandats : personne ne sera étonné que René Dosière soit l’un de ses plus fervents partisans !
Enfin, René Dosière s’interroge à juste titre sur l’évolution du personnel politique, sur le déséquilibre de la représentation des différentes générations au sein des conseils municipaux – les retraités y étant toujours davantage surreprésentés –, sur les difficultés qu’éprouvent les salariés du privé, les travailleurs indépendants ou professions libérales à accéder aux fonctions électives.
Sur ce thème, qu’il me soit permis de regretter que la proposition de loi de Jacqueline Gourault et moi-même, qui contient plusieurs mesures pour répondre à ces difficultés n’ait pas pu être inscrite pour une ultime lecture à l’Assemblée Nationale avant l’installation prochaine des futurs conseils municipaux. Ce sera pour avril, nous a-t-on dit : acceptons-en l’augure !
Mais revenons au livre. Chacun aura compris qu’il est précieux et utile. Et qu’il permet d’appréhender positivement le mandat d’élu local, qui n’est pas un métier (contrairement à ce que suggère le titre de l’ouvrage…) mais « un engagement, une mission publique à durée déterminée au service de l’intérêt général » comme l’écrit très justement René Dosière.
Jean-Pierre Sueur
*Editions du Seuil
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